Le Kae-Sa-Luk, l’art traditionnel de sculpter les fruits
Lors d’un voyage en Thaïlande, vous serez sans doute amené à voir des sculptures sur fruits et légumes. Cette coutume porte un nom : c’est le Kae-Sa-Luk. D’où vient cette tradition ? À quelle occasion les thaïlandais sculptent des fruits et légumes ? On vous en dit plus sur ces œuvres d’art éphémères...
Qu’est-ce que le Kae-Sa-Luk ?
Le Kae-Sa-Luk est un art traditionnel thaïlandais qui consiste à sculpter des fruits et légumes pour en faire des œuvres d’art éphémères. Sont utilisés des fruits comme le melon, la pastèque, la papaye, l’orange, la mangue, les fraises mais aussi des légumes comme le concombre, la carotte, le navet...
Les sculpteurs de Kae-Sa-Luk taillent et sculptent les fruits et légumes dans de multiples formes. À l’origine, on retrouvait surtout des représentations de fleurs et volutes. Aujourd’hui, les fruits et légumes prennent aussi la forme d’animaux et de créatures mythologiques
Évidemment, ces sublimes sculptures ne sont pas faites pour durer dans le temps. En général, elles ne tiennent qu’un à deux jours. Pour les conserver et éviter qu’ils ne perdent leurs couleurs, les artistes trempent les fruits thaïlandais dans un mélange d’eau et de jus de citron.
Le Kae-Sa-Luk, quelles origines ?
Comme beaucoup de traditions, les origines du Kae-Sa-Luk font débat. Plusieurs théories se disputent autour de la question des premières sculptures de fruits et légumes dans le monde.
Les origines thaïlandaises du Kae-Sa-Luk
En Thaïlande, l’origine du Kae-Sa-Luk remonterait au royaume de Sukhothaï (1238-1438) et serait associée à la fête thaïlandaise appelée Loi Krathong. En effet, c’est durant cette fête traditionnelle, en 1364, que Nang Noppamart, une servante du roi Phra Ruang, décida de décorer son Krathong d’une fleur et d’un oiseau sculptés dans un légume. Une initiative qui impressionna le roi au point qu’il ordonna à toutes les femmes du royaume d’apprendre cet art sculptural.
À l’occasion, les Thaïlandais fabriquent des petits radeaux en feuilles de bananiers (appelés kratong) sur lesquels ils installent des offrandes (bougies, encens, fleurs, confiserie...). Les radeaux sont ensuite déposés sur les rivières et les fleuves à la nuit tombée. La Loi Krathong a lieu chaque année, entre octobre et novembre, selon le calendrier lunaire, lors de la pleine lune du 12ᵉ mois.
Les origines chinoises de la sculpture sur fruits et légumes
Pour d’autres, le Kae-Sa-Luk aurait pour origine, l’époque de la dynastie Tang (705-907) et Song (960-1279) en Chine. Selon cette version, la sculpture sur fruits et légumes proviendrait de l’empereur Tang Zhongzong qui, après avoir reconquis le pouvoir, aurait offert de nombreuses offrandes aux dieux pour les remercier. Parmi les offrandes, on retrouvait les fameuses sculptures sur fruits et légumes reprenant la forme d’animaux mythologiques comme les dragons.
Le Mukimono, la sculpture sur fruits et légumes au Japon
La sculpture sur fruits et légumes existe aussi au Japon sous le nom de mukimono. Là encore, les origines de cet art sont discutées. Les premières sculptures sur fruits du Japon dateraient de la période Edo au Japon (1603-1868) durant laquelle ils étaient utilisés pour sublimer les assiettes, à l’époque où la nourriture était servie dans des poteries d’argile non émaillées et donc, non décorées.
Le Kae-Sa-Luk aujourd’hui
En Thaïlande, le Kae-Sa-Luk fait aujourd’hui partie du patrimoine national et touristique. Les thaïlandais perpétuent la tradition pour offrir des offrandes aux moines mais aussi pour la confection d’offrandes lors d’événements importants (comme les cérémonies, les mariages...) et bien sûr, lors de la fameuse fête de Loi Krathong.
Le Kae-Sa-Luk est enseigné dans les écoles à partir de l’âge de 11 ans. C’est aussi une discipline artistique à part entière dans les écoles d’art, au même titre que la peinture. De nombreux festivals et concours sont aussi consacrés à cette tradition. En effet, des compétitions de sculpture sur fruits et légumes sont organisées chaque année en Thaïlande.
Florine Dergelet